Haïti

Saj Fanm pou Fanm (SFF)

Je me rappelle qu’un jour, une dame ayant déjà perdu trois bébés mort-nés avait trouvé le sourire et l’espoir grâce à un bon suivi du travail et de l’accouchement que j’avais effectué. J’étais restée à son chevet depuis le début de la phase active jusqu’à l’accouchement du bébé qui est né en très bonne santé.

– Marie Eleine Alcidas, sage-femme

J’ai de très bons rapports avec ma sage-femme. Elle est sympathique et très attentionnée. Lorsque je suis avec elle, je me sens toujours bien encadrée et respectée. J’ai reçu des soins de qualité. Elles sont toujours disponibles et responsables. De plus, les sages-femmes travaillent avec leur cœur.

– Marvine Saintina, femme enceinte

Haïti présente l’un des contextes les plus fragiles au monde, après des décennies d’oppression, de corruption et de catastrophes naturelles. À la suite du dernier tremblement de terre, les hôpitaux font état d’un manque de médicaments et fournitures médicales essentielles, et les citoyens sont la cible d’enlèvements.

TAUX DE MORTALITÉ MATERNELLE

523 décès pour 100 000 naissances vivantes

42% d’accouchements assistés par du personnel de santé qualifié

Cette expo décrit les incroyables défis auxquels sont confrontées les futures mères en Haïti, ainsi que les efforts tout aussi incroyables déployés par les sages-femmes pour leur offrir les soins dont elles ont besoin.

Je me souviens d’avoir eu peur. J’ai senti que Dieu m’accueillait. Mais j’ai pensé que non. Vous ne pouvez pas encore quitter votre bébé. Je me souviens de m’être réveillée à la clinique. La sage-femme m’a sauvé la vie.

– Anonyme, femme enceinte

L’objectif du projet SFF est de contribuer à la réduction de la mortalité maternelle et infantile par l’amélioration de la santé sexuelle et reproductive des femmes et des filles en Haïti dans quatre départements (Nord-Ouest, Sud-Est, Nippes et Grande Anse), en mettant l’accent sur la réduction des inégalités entre les sexes et le renforcement des capacités des femmes et des filles à faire des choix basés sur leurs droits sexuels et reproductifs.

L’Association des Infirmières Sages-Femmes d’Haïti (AISFH) a été fondée en 2004. Sa mission est de promouvoir la profession de sage-femme et son rôle vital dans la diminution des taux de mortalité maternelle et néonatale en Haïti. L’Association travaille en collaboration avec d’autres entités (telles que le Ministère de la Santé Publique et de la Population, la Société Haïtienne d’Obstétrique et Gynécologie, etc.) pour contribuer à l’amélioration des soins et promouvoir la santé et le bien-être des femmes en Haïti. La mission de l’AISFH est de travailler au développement professionnel de ses membres et au rayonnement de la profession sage-femme en Haïti.

Les infirmières et les sages-femmes représentent
près de 50 % du personnel de santé mondial.

Revenu national brut par habitant en Haïti :
1 665 USD (annuel)

Salaire des sages-femmes :
1 200 à 3 000 USD (annuel)

Aujourd'hui en Haïti, 250 sages-femmes servent
plus de 2,8 millions de femmes en âge de procréer.

© UNFPA Haïti : Soins respectueux et violation des droits des femmes : An Emerging Issue in Haiti, par Vavita Leblanc, spécialiste de la santé maternelle, UNFPA Haïti CO

Un jour, alors que je faisais mon stage dans un hôpital en tant qu’élève infirmière, j’ai assisté une sage-femme qui effectuait une réparation périnéale. À mes yeux d’infirmière stagiaire, le vagin de cette jeune femme qui avait accouché 2 jours plus tôt était irréparable. Mais cette sage-femme est arrivée avec confiance et compétence et savait très bien comment le réparer. C’était extraordinaire et miraculeux. Ce jour-là, je me suis dit que je devais acquérir cette compétence et me voilà aujourd’hui sage-femme et les réparations périnéales sont devenues une routine pour moi.

– Virginie Pluviose, sage-femme

ENGAGEMENT DU PUBLIC ET DE LA COMMUNAUTÉ

Les sages-femmes haïtiennes militent pour l’accessibilité à l’information pour les femmes et les familles haïtiennes. À cette fin, elles participent régulièrement à des émissions de radio pour partager des informations sur divers sujets liés à la santé sexuelle et reproductive. Les sages-femmes haïtiennes luttent également contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles.

Mon rapport est positif avec la communauté. Je participe régulièrement à des activités de cliniques mobiles, clubs de mères et séances de sensibilisation. Cela nous aide à détecter des pathologies et à prendre connaissance avec le milieu.

– Résia Pierre-Pierre, sage-femme

Les femmes avec qui je prends contact me demandent toujours mon assistance lors de leur accouchement, et lorsque les sages-femmes organisent des activités de sensibilisation dans les écoles le 8 mars, j’y prends régulièrement part. À côté de l’organisation des cliniques de dépistage de CA du col par la méthode IVA/Pap Test, je participe dans des émissions de radio en lien à la promotion de la profession sage-femme et la planification familiale.

– Mona Metellus Milord, douze ans d’expérience

JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA SAGE-FEMME

Pour la Journée internationale de la sage-femme, l’AISFH, malgré les restrictions imposées par le COVID, a profité de l’occasion pour mener des activités de sensibilisation du public dans les différents départements. L’Association a notamment fait la promotion du dépistage précoce du cancer du col de l’utérus, des consultations prénatales et des séances de formation avec des sages-femmes.

FORMATION

16 sages‑femmes formatrices ont été formées dans le cadre de la Formation en Urgence Obstétricales (FUO) pour renforcer leurs compétences techniques, cliniques et pédagogiques.

116 prestataires de soins de santé (sages‑femmes, infirmières, médecins et gynécologues‑obstétriciens) ont été formés par les instructeurs de la FUO.

L’application Safe Delivery  a été introduite dans la FUO, qui a été déployée dans les établissements de soins de santé comme ressource sur le lieu de travail pour soutenir l’apprentissage continu des prestataires de soins de santé. Environ 400 prestataires de soins de santé utilisent maintenant l’application pour soutenir leur apprentissage en Haïti.

COVID-19

L’impact de COVID-19 sur les travailleurs de la santé au cours de la pandémie a été sévère sur leur bien-être mental et physique. Les infirmières se sont plaintes du manque de matériel, de la surcharge émotionnelle, et des difficultés à faire comprendre aux patients la nécessité de porter le masque et de respecter la distanciation sociale. Confrontées à la crise sanitaire liée au COVID-19, les infirmières confient leur impuissance et leur détresse psychologique, car elles ont vu que partout où la crise sanitaire fait rage, les infirmières sont en première ligne. Elles ont l’angoisse de voir des patients arriver en masse, car elles font en plus face un peu partout à un manque de matériel.

Allons-nous résister à la fatigue alors que nous étions déjà en sous-effectif? Nous nous posons aussi des questions sur notre vie en dehors de l’hôpital. J’ai peur de contracter le COVID-19. Pas tellement pour moi, mais parce que je pourrais être porteuse pour mes proches, mes collègues et mes patients. Le jour où mon hôpital a reçu le premier cas de COVID, j’ai eu tellement peur que j’ai passé la nuit avec mon masque sur le visage.

– Je, infirmière

Elle a surtout mis l’emphase sur les soins à prodiguer au bébé ainsi que l’allaitement maternel exclusif. Elle m’a donné des conseils sur la manière de me protéger contre le coronavirus; l’importance de la vaccination et les bienfaits d’une bonne alimentation pour le bébé.

– Robencia Mathurin, femme enceinte

...Et aussi je me sens un peu stressée, mais j’essaie de gérer mon stress parce qu’en laissant l’hôpital en arrivant chez nous nos enfants ont tendance à venir nous coller dessus, et moi dans la crainte de la propagation du virus, je leur dis “non”, et je m’éloigne d’eux. Dès que je sens un signe faisant partie des signes du virus, je me mets en quarantaine. C’est vraiment stressant pour moi. Le pire je ne sais pas quand est-ce qu’on aura une solution à cette pandémie.

– Katiana Mie Brunot, sage-femme et infirmière

ALO SAJ FANM

La ligne téléphonique Alo Saj Fanm est un service téléphonique gratuit offert 24 heures sur 24, sept jours sur sept, aux habitants d’Haïti. Fruit d’une collaboration entre l’Association des infirmières sages-femmes d’Haïti (AISFH), le FNUAP et l’ACSF, elle reçoit le soutien financier d’Affaires mondiales Canada. La ligne téléphonique permet d’écouter des informations pré-enregistrées sur la santé maternelle et infantile, et la santé sexuelle et reproductive, ou de parler directement avec une sage-femme. Ce service téléphonique est conçu pour combler les lacunes du système de santé vulnérable d’Haïti, où la plupart des mères n’ont accès à aucun soin de santé, en particulier dans les zones reculées.

Le service d’assistance téléphonique a reçu plus de 12 000 appels depuis son lancement en septembre 2020.

Plus de 750+ se sont inscrits pour recevoir des notifications push (Messages SMS) avec des informations sur la santé maternelle et infantile.

L’AVENIR

De 2000 à aujourd’hui, la profession sage‑femme en Haïti ne cesse d’évoluer, cette profession qui des dizaines d’années avant n’existait guère pour certains et pour d’autres était confondue à l’accouchement traditionnel, commence à prendre sa place timidement au sein du système de santé haïtien.

Passée d’une école de spécialisation des infirmières en sage‑femme d’environ 18 mois d’études à une école de formation en sages-femmes avec 3 ans d’études, la profession sage‑femme est maintenant sur le point de s’universitariser dans le cadre de sa formation et sera une étude de 4 ans et de ce fait intégrera l’Univerisité d’État d’Haïti (UEH).

Grâce à diverses stratégies employées par l’Association des Infirmières Sages‑femmes d’Haïti (AISFH), bon nombre de gens au sein de la communauté haïtienne commencent à s’approprier de cette profession qui fait sien le bien‑être de la femme.

Cependant, la route est encore longue. Cette profession qui dans le monde est considérée comme la 3e profession médicale, encore aujourd’hui du mal à prendre sa place au sein du système sanitaire haïtien. Sa reconnaissance et valorisation laisse encore à désirer. Un processus de réglementation de la pratique sage‑femme s’impose et le nombre de sages‑femmes déployées sur tout le territoire est loin d’être suffisant pour contribuer de manière significative à la réduction du taux de mortalité maternelle en Haïti.

Mais le meilleur reste à venir. Grâce aux supports de nombreux partenaires de l’AISFH, la profession sage‑femme avance peut-être lentement, mais sûrement vers un brillant avenir, où plus d’une école de sage-femme se chargera de former la quantité de sages‑femmes nécessaires à la réduction du taux de mortalité maternelle et néonatale en Haïti, où cette profession sera reconnue et valorisée par la communauté haïtienne, et enfin où leurs conditions de travail seront améliorées, et la pratique de la profession réglementée.

Jeffthanie Mathurin, Responsable de communications et relation publique, AISFH

Aux futures sages-femmes ...

Je leur conseillerais de bien examiner leur choix. Je leur montrerai la beauté de cette profession, mais qui demande une abnégation, de l’empathie pour pouvoir l’exercer avec amour et passion. Aussi, je leur ferai un rappel de l’objectif principal pour lequel l’institut a été fondé, à savoir contribuer à la réduction du ratio de mortalité maternelle et néo natale en Haïti.

– Marthe-Elvire Fenelon, sage-femme